Une sépulture des troglodytes du Périgord (crânes des Eyzies)
(par R. Nespoulet et D. Henry-Gambier) L’article de Louis Lartet, qu’il écrit à l’âge de 28 ans, reste un document princeps de référence, le seul qui donne un contexte à la découverte fortuite des vestiges humains au lieu-dit « Cro-Magnon », dans le village des Eyziesde- Tayac, au printemps 1868. C’...
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Published in: | Bulletins et mémoires de la Société d'anthropologie de Paris Vol. 30; no. 3-4; pp. 121 - 128 |
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Main Author: | |
Format: | Journal Article |
Language: | French |
Published: |
Heidelberg
Lavoisier
01-10-2018
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Summary: | (par R. Nespoulet et D. Henry-Gambier)
L’article de Louis Lartet, qu’il écrit à l’âge de 28 ans, reste un document princeps de référence, le seul qui donne un contexte à la découverte fortuite des vestiges humains au lieu-dit « Cro-Magnon », dans le village des Eyziesde- Tayac, au printemps 1868. C’est un véritable rapport d’expertise, commandité par Victor Duruy, ministre de l’Instruction publique de l’époque, dans le but de « vérifier l’authenticité de cette découverte » (p. 337). La mission de Louis Lartet comporte en effet une dimension politique. C’est le ministre qui commandite l’opération, et qui financera les nombreux moulages des fossiles distribués dès 1869 dans les musées d’archéologie. Les vestiges originaux, eux, seront ramenés à Paris, et conservés au Muséum national d’Histoire naturelle. Ils y demeurent encore aujourd’hui. Louis Lartet intervient non seulement au titre de sa filiation avec Édouard Lartet son père, fouilleur d’Aurignac et de plusieurs sites classiques de la vallée de la Vézère, mais aussi en tant que naturaliste à la double compétence en géologie et en préhistoire. À ce titre, sa mention à la « Pétra périgourdine » (p. 336) ne doit pas être comprise comme une référence romantique à une archéologie exotique, mais bien à son expérience de terrain au Proche-Orient. Le but principal de son expertise à Cro-Magnon est, au-delà de la confirmation de l’authenticité de la découverte, de prouver la grande ancienneté de la couche géologique qui a livré les vestiges humains. Par un focus progressif, de la lecture du paysage à la description détaillée et argumentée de la stratigraphie et de la position des différents objets archéologique découverts, Louis Lartet contextualise précisément les vestiges humains. Son observation géomorphologique du massif crétacé de la vallée de la Vézère, de la formation des abrissous- roche et de leur comblement par l’érosion, apporte ainsi la preuve que les dépôts de Cro-Magnon sont scellés par un long processus géologique. Louis Lartet réponds ainsi à la commande qui lui a été faite. À quelle espèce fossile appartiennent ces crânes et ces ossements ? Lartet renvoie prudemment la balle dans le camp des anthropologues de son époque. Quant à la datation du niveau ayant livré les vestiges humains, il ne s’y aventure pas. Il faudra attendre 136 ans pour qu’une réponse soit proposée. Elle modifiera radicalement notre perception des « sépultures » du Paléolithique supérieur en Périgord.
(par R. Nespoulet et D. Henry-Gambier)
This article written by Louis Lartet, at the age of 28, is still a reference document. Setting the context of the fortuitous discovery, in the spring of 1868, of human remains in the hamlet of Cro-Magnon near the village of Les Eyzies-de-Tayac, it was commissioned by V. Duruy, then Minister for Public instruction, on a request from E. Lartet, in effect as an expert report to “verify the authenticity of the discovery”. The mission entrusted to Louis Lartet had a political dimension: interest in the “skulls” of Cro-Magnon was being expressed at the highest levels of the French State. The dig was financed by V. Duruy and castings of the fossils were distributed to archaeological museums within a year. The original remains were brought to Paris to be curated at the National Museum of Natural History, where they still remain today. Louis Lartet was entrusted with his mission as the son of Édouard Lartet, who directed the excavations at Aurignac and several other classic archaeological sites in the Vézère Valley, and as a naturalist specialising in both Geology and Prehistory. The aim of his expert study at Cro-Magnon was to confirm the authenticity of the discovery, to prove the age of the geological layer that had yielded the human remains, and thus the age of the bones themselves. By gradually closing in from the landscape as a whole to the stratigraphy and the exact position of the archaeological objects, Lartet’s description situates the human remains precisely in their context. His geomorphological observations of the Cretaceous massif in the valley of the Vézère and of the formation of the rock shelters and their infilling material proved that the Cro- Magnon deposits were sealed in by a lengthy geological process. It should be remembered, however, that Lartet studied the site after the discovery was made, so that the plan and stratigraphic sections are based on reports from the workmen. The hypothesis of a burial site was accepted without further discussion. But what species did these skulls and bones belong to? Lartet prudently referred the matter to contemporary anthropologists. As for dating the human remains, 136 years elapsed before an answer was put forward, and that answer radically changed our perceptions of Upper Palaeolithic “burials” in the Périgord. The fact remains, however, that Lartet’s study was an exemplary contribution at the time. |
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ISSN: | 0037-8984 1777-5469 |
DOI: | 10.3166/bmsap-2018-0029 |