Plasmaphérèse de sauvetage dans une maladie des agglutinines froides : leçons tirées d’un cas d’anémie hémolytique hyperaiguë et de défaillance rénale

L’anémie hémolytique auto-immune (AHAI) est une entité rare dont le pronostic est intimement lié à la maladie associée des formes secondaires. L’AHAI du patient réanimatoire est mal documentée et s’accompagne d’un taux de mortalité élevé. L’intérêt des échanges plasmatiques (EP) est controversé et e...

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Published in:La revue de medecine interne Vol. 40; pp. A122 - A123
Main Authors: Agbekodo, S., Calleja, A., Kouchit, Y., Panicucci, E., Schoulmann, A., Aurenche-Mateu, D., Morand, L., Doyen, D., Dellamonica, J., Hyvernat, H., Buscot, M., Martis, N.
Format: Journal Article
Language:French
Published: Elsevier Masson SAS 01-12-2019
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Description
Summary:L’anémie hémolytique auto-immune (AHAI) est une entité rare dont le pronostic est intimement lié à la maladie associée des formes secondaires. L’AHAI du patient réanimatoire est mal documentée et s’accompagne d’un taux de mortalité élevé. L’intérêt des échanges plasmatiques (EP) est controversé et est difficilement étudiable dans la maladie des agglutinines froides (MAF) d’évolution fulminante. Nous rapportons le cas d’un patient de 75 ans, sans comorbidité, qui a présenté un livedo racemosa intéressant l’ensemble de la peau, avec une splénomégalie et un ictère à bilirubine libre. On notait un phénomène de Raynaud apparu 3 ans auparavant. Le patient est pris en charge en réanimation pour l’installation d’une insuffisance rénale KDIGO 3 et l’inefficacité d’une corticothérapie sur l’hyperhémolyse et la profondeur d’une AHAI à anticorps froids anti-C3d. Un pic monoclonal IgMk de 3,6g/L est identifié dans un contexte de cryoglobulinémie de type I, et l’absence d’anomalie du complément. L’immunophénotypage caractérise une macroglobulinémie de Waldenström. Il n’est pas trouvé d’argument pour une origine infectieuse ni pour une connectivite. Le patient nécessitait une épuration extrarénale (EER) qui est réalisée avec un réchauffement et une intensification de la corticothérapie. Devant la mauvaise tolérance cardiocirculatoire de l’anémie et des dysfonctions du circuit d’hémodialyse attribuées aux entités associées à l’IgMk monoclonale, une première série d’EP selon un schéma j1–j2–j5 est pratiquée pour encadrer le support transfusionnel érythrocytaire. Le fluide de substitution était de l’albumine 4 % avec une masse plasmatique de 1–1,5. Le rendement transfusionnel est amélioré parallèlement à l’amendement en 24h des stigmates d’hémolyse intravasculaire. Le rituximab (RTX) est initié à j5 (=j1 RTX) et sera associé à la bendamustine (j2–j3 du RTX) et l’ibrutinib quotidien. La réticulocytose étant indosable, de la darbepoétine alfa est instaurée. À j15, une rechute de l’AHAI est constatée, suivie d’une épistaxis compliquée de choc hémorragique attribuable à l’ibrutinib. Une hypofibrinogénémie aggravée par les EP est éliminée. Une 4e séance d’EP permettra une réponse hématologique transitoire. L’EER est sevrée devant l’amélioration de l’insuffisance rénale liée à la probable nécrose tubulaire aiguë. Sur une période d’un mois, le patient aura reçu 19 CGR et 3 PFC. L’évolution sera marquée par le caractère réfractaire de la cytopénie et le décès du patient de choc septique deux mois plus tard malgré les traitements anti-infectieux prophylactiques. L’hémolyse hyperaiguë dans le contexte de MAF est exceptionnelle mais engendre une morbidité importante surtout quand elle s’accompagne de défaillance aiguë d’organe. La thérapie médicamenteuse consiste en du RTX et son association avec une chimiothérapie du lymphome. La corticothérapie et la splénectomie sont inefficaces. Le recours aux EP se justifie dans les cas d’hémolyse fulminante, relevant de support transfusionnel et/ou dans l’attente d’une efficacité des traitements immunosuppresseurs. Cette logique repose sur la clairance des auto-anticorps, complexes immuns et fractions du complément circulants. Dans la MAF, l’hémolyse chronique est surtout intratissulaire. L’utilisation des EP porte ainsi sur l’activité hémolytique des IgM circulantes. L’amplitude thermique des auto-IgM peut être telle que l’agglutination dans le circuit extra-corporel impose le recours aux EP, chez des patients nécessitant une EER comme cela a été le cas pour notre patient. Les études sur l’utilisation des EP dans les AHAI sévères se limitent à des petites séries rétrospectives et d’études de cas. Il semble important de distinguer l’efficacité aléatoire des EP rapportée dans les AHAI à anticorps chauds (mais mieux décrites), des cas de défaillances d’organe dans la MAF qui pourraient bénéficier de la réponse, certes transitoire, de cette technique. Par ailleurs, on privilégiera des anti-néoplasiques d’action rapide en limitant les produits induisant des saignements. La perfusion de plasma doit être très limitée car elle pourrait, en théorie, entretenir l’hémolyse par l’apport de C3 et C4. Les traitements tels que le bortézomib ou eculizumab ne sont que de recours exceptionnel et mis en balance avec le risque infectieux majeur préexistant. Les EP constituent un choix thérapeutique intéressant dans la gestion de l’hémolyse hyperaiguë et de défaillance d’organe de ces formes exceptionnelles de MAF fulminantes. Une meilleure compréhension de leur place dans cette pathologie pourra être apportée par le recours à un appel à observations.
ISSN:0248-8663
1768-3122
DOI:10.1016/j.revmed.2019.10.161